(Réédition du 28/10/10)
La première chose que je regarde, lorsque je vais chez quelqu’un pour la première fois, c’est la présence de livres. Peu importe le genre de littérature, mais une maison ou un appartement sans livres me semble vide. Froid. Sans vie. Lorsque je regarde une émission de déco à la télé, la question qui me préoccupe toujours le plus est la suivante : mais où mettent-ils leurs livres??! Et pour ceux qui en ont, pourquoi le décorateur s’obstine-t-il à les dissimuler? Il paraît que ce n’est pas harmonieux visuellement, une bibliothèque!
Je suis choquée par cette idée, mais du coup, je me suis demandée… Pourquoi, alors que certaines personnes n’imaginent pas vivre sans des bibliothèques surchargées, d’autres n’ouvrent jamais un livre? De qui tenons-nous notre goût pour la lecture? Qu’est-ce qui a rendu certains plus sensibles que d’autres au pouvoir des mots, de l’imagination? Est-ce prédestiné, génétique? Héréditaire? J’ai tendance à croire que c’est une bonne dose de prédisposition assortie d’un héritage favorable.
C’est ma mère qui m’a appris à lire, avant que je n’aille à l’école. Sans être une grande lectrice elle-même (trop d’enfants, pas le temps), elle avait un sain respect pour les livres. Et bien sur, elle m’a lu des histoires dès mon plus jeune âge.
Mon père, c’est autre chose, c’est un malade de lecture. Mais des choses très sérieuses, qu’il ne partageait pas avec nous. Pensez, il n’y avait même pas d’images dans ses livres, ou alors parfois quelques photos ennuyeuses, du genre un chameau au milieu du désert, ou un portrait de vieux monsieur en noir et blanc… Mais même comme cela, il m’a transmis un rapport bizarre au livre : lors des nombreux déménagements de mon enfance, et malgré le poids et les difficultés que cela pouvait entraîner, nous avions des dizaines de cartons de livres à emmener avec nous à chaque fois. Les livres étaient à la fois le boulet du déménagement, et l’élément familier qui symbolisait notre maison, où que nous soyons. D’aussi loin que je me souvienne, dans tous les lieux où nous avons vécu, il y avait toujours des livres dans toutes les pièces : chambres, bureau, bibliothèque, couloirs, entrée, sous-sol…
Pour l’entourage moins proche, même problème : chez les grands-parents, d’un coté, de l’autre, chez les oncles et tantes où nous allions en vacances… En ce qui me concerne, je crois que c’est un peu tout cela réuni qui m’a contaminée et a fait de moi une lectrice avide. Ce serait donc l’environnement? Oui, mais pas seulement. Les résultats n’ont pas été les mêmes par exemple entre mes frères et moi. Mon grand frère est comme mon père, il lit beaucoup, des choses très sérieuses, l’un de mes petits frères n’aime pas vraiment la lecture.Et moi, eh bien je lis de la romance, il paraît que cela ne compte pas. Mais je « consomme » tout de même entre 4 et 8 livres par mois!
Plus que n’importe qui, je crois que c’est ma mère qui m’a transmis ce virus, c’est elle la responsable du temps que je passe encore aujourd’hui le nez plongé dans un livre, et elle m’a donné en héritage des livres qu’elle avait elle-même aimé. Je vous ai déjà parlé d’Anne, il est temps de s’intéresser à Judy, l’héroïne de Daddy Long-legs (Papa Longues Jambes) de Jean Webster.
Jerusha Abbott, aka Judy, a grandi dans un lugubre orphelinat américain, circa 1900. Trouvée bébé, son nom a été choisi par Mrs Lippett, la directrice : Jerusha vient d’une tombe, et selon Mrs Lippett, c’est un prénom « solide », quand à Abbott, c’était le 1er nom dans l’annuaire! Ses 18 ans approchant, Judy devrait bientôt quitter l’orphelinat pour un métier fort enviable, genre domestique, domestique ou domestique. Et en attendant, elle s’occupe des petits de l’orphelinat… Un jour, Judy, que l’on n’appelle pas encore Judy mais plus sagement Jerusha, est convoquée chez la directrice.
Sa vie va changer ce jour-là : l’un des « bienfaiteurs » de l’orphelinat a décidé de s’intéresser à elle, et parce qu’il trouve qu’elle écrit bien, qu’elle a de l’esprit, et du coup, le potentiel pour devenir écrivain, il a décidé de lui payer des études à l’université! Judy se disant que c’est une perspective d’avenir nettement plus enviable que domestique (et elle a bien raison), accepte aussitôt! Seule condition à cette bourse d’études providentielle, notre héroïne doit envoyer à son bienfaiteur une lettre mensuelle sur ses activités diverses et variées.Parce qu’il souhaite rester anonyme (les lettres sont à adresser à M. John Smith – qui ne répondra jamais), Judy décide de le surnommer « Papa Longues Jambes », en référence à sa grande silhouette dégingandée, à peine entre-aperçue.
La suite de l’histoire nous est alors racontée à travers les lettres que Jerusha (qui devient enfin Judy) envoie, racontant son installation à l’université, ses cours, ses exploits sportifs, ses voyages, ses premières tentatives d’écrivain, sa rencontre avec un charmant jeune homme… Le style pétillant et malicieux qu’elle utilise dans ses lettres émaillées de petits dessins (de la main même de l’auteur), nous entraîne au fil de ses années universitaires, vers ses projets d’avenir, son émancipation de femme… Et bien évidemment, à la découverte de l’identité de ce mystérieux Papa Longues Jambes!
Ce roman est un classique de la littérature nord-américaine, maintes fois adapté en film et en dessin animé. Pour prolonger le plaisir, il existe également une suite, Dear Enemy, ou Mon ennemi chéri, qui est bien moins connue, et nous raconte l’histoire de Sally, la meilleure amie de Judy à l’université. Et sur le sujet, je vous fait partager l’avis d’une autre guest-star, Pirouette :
« Côté réflexions sur l’éducation et idées philosophiques, il y a plein de commentaires sur l’influence de l’hérédité, de l’environnement, les méthodes d’éducation plutôt douces (par rapport à celle de Mrs Lippett) et les bienfaits d’une bonne hygiène de vie : aérer les salles, envoyer camper les garçons dehors, varier la nourriture, faire travailler les enfants soit aux champs, soit à la cuisine, à la couture, etc. C’est vraiment très intéressant. Et on peut l’écouter sur librivox.org (NdA : pour les fans des audio-books, donc pas moi!). L’auteur fait référence à Montessori et à d’autres théories de l’éducation. C’est assez avant-gardiste pour l’époque. Elle insiste encore une fois aussi sur le suffrage des femmes, ou plutôt le fait qu’elles n’aient toujours pas le droit de vote. L’horreur!! L’auteur a l’air de croire que l’éducation peut tout changer et sauver tout le monde ».
Si ces livres ont survécu à l’épreuve du temps, c’est bien parce qu’au-delà de la romance, on y trouve différents niveaux de lecture!
Et j’espère bien que si j’ai un jour une fille, elle aussi les aimera, et les conservera précieusement, dans sa maison envahie par les livres (oui, je souhaite avoir des enfants qui hériteront de la maladie familiale)… En attendant, si vous n’avez pas encore lu Papa Longues Jambes, et sa suite, précipitez-vous chez votre libraire!
Bonne lecture,
Chi-Chi
Quel bel article, si doux, si intime.
Mes parents lisaient très peu. Papa, seulement des livres très très sérieux comme le Code Civil ! Il aimait s’y plonger le matin avec sa tasse de café ! A chacun son univers… Petite, j’ai toujours aimé les livres avec de beaux dessins. Mon premier livre lu comme une « grande » a été « Tistou les pouces verts » et j’ai enchaîné avec les Fantômette. Mordue ! Déjà, quand on allait chez des amis, je regardais leurs livres. Je devais avoir 8 ans la première fois que j’ai osé demander à me servir. Un livre sur une machine à remonter le temps. J’ai lu ce livre par petits bouts, à chaque visite.
J’étais la seule lectrice dans ma famille. J’étais aussi regardée bizarrement par les copains ! sorte d’extraterrestre. J’avoue en avoir un peu souffert. Pour la romance, mon premier Harlequin a été à 13 ans. Gros coup de chaud à la lecture !!! I y avait eu un bisou pris de force.
Je me suis mariée avec un homme qui avait dans son appartement une pièce que pour ses livres. Je ne l’ai pas choisi que pour ça… Notre rêve à l’époque, c’était une maison et une bibliothèque. Allez expliquer aux agents immobiliers que nous, petit couple sans enfant, voulions 3 chambres ET une pièce pour nos livres !!!
Bref, je vais faire court… ce matin, c’est confidences chez vous les filles !… Nous avons eu notre maison, NOS pièces aux livres, des garçons-lecteurs-dévoreurs… et moi j’ai eu un blog ! C’est chouette les blogs pour ça !!!
Chi-Chi, chaque fois que je regarde les émissions de déco, je constate aussi qu’on ne voit pas de bibliothèque ou alors des étagères vides.
Voilou… bonne fin de semaine !
Oh Titsou les pouces verts, quel souvenir et quelle émotion!!!
Je suis toujours étonnée de voir, dans ma famille, des gens chez qui les livres n’ont pas pris, et qui s’en désintéressent… Mais si la vie et les déménagements (aidés par l’ebook je l’avoue) ont fini par me faire renoncer à ma bibliothèque, je constate que je continue à accumuler les livres malgré mois – déjà une grosse dizaine en 6 mois de vie dans mon nouvel appart…
Un jour, j’aurais un chez moi et comme tu le dis, une pièce pour mes livres!
Il faut définitivement que je relise ce petit bijou !
C’est beau ces rencontres avec le monde de la lecture !
Pareil, j’ai toujours rêve d’avoir une pièce à livres chez moi, même si je continue d’en semer un peu partout dans la maison ^^ (beaucoup moins depuis que j’ai mon kindle).
Petite, mon papa m’amenait chaque samedi après-midi à la bibliothèque pour choisir de nouveaux livres et ramener ceux empruntes la semaine d’avant. Et il m’offrait ceux qui m’avaient plu et d’autres qu’il voulait me faire découvrir
Lorsque je suis invitée chez des gens, la 1e chose que je regarde c’est s’il y a des livres et s’il y en a pour les enfants. J’ai lu des histoires à mes enfants des leur naissance, j’espère en faire de grands lecteurs…
Grâce au Kindle, je me concentre sur les livres un peu plus « précieux » – livres d’art, cadeaux, héritages divers, belles éditions, etc…
C’est vrai que les livres est certainement la chose que mes parents n’ont jamais rechigné à nous offrir!
Mon fils aîné a eu sa bibliothèque avant son lit😉
En fait, nous avions acheté et monté une bibliothèque, elle était déjà remplie de tous mes livres d’enfance que ma mère avait gardé précieusement et …il a décidé de naître à 7 mois et demi.
Depuis, il a beaucoup grandi et est devenu un fan de Balzac.
J’ai beaucoup de chances : mes 3 enfants lisent tous beaucoup (y compris sur le net …), la clé a été que lire soit d’abord un plaisir, quelque soit le livre, et seulement après éventuellement utile pour l’école.
Moi aussi, dans une maison inconnue, mon premier réflexe est de chercher des yeux la bibliothèque (chouette découverte de voir que je ne suis pas la seule dans ce cas).
Merci pour ce blog , sa liberté de ton et ce plaisir lire ce qui nous tente, comme une envie de fraises tagada qui fait du bien parfois !
Il est prédestiné à aimer les livres donc! J’aime l’idée que les enfants héritent des livres de leurs parents, c’est un objet et tout une histoire en plus…
Et merci pour tes jolis compliments qui nous touchent beaucoup, c’est un bonheur de se rassembler autour d’une passion commune!